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Pour l'amour des tortues

Tortue peinte sur son nid (Photo Rod Steinacher)

Tortue peinte sur son nid (Photo Rod Steinacher)

J’ai toujours adoré les tortues. Donc, dès que l’on m’a confié ma première tâche en tant que stagiaire auprès de Conservation de la nature Canada (CNC) dans le centre ouest de l’Ontario, à savoir mener des relevés de tortues dans la péninsule de Saugeen Bruce, sur le lac Huron, je débordais évidemment d’enthousiasme.

Ce que je préfère chez les tortues, c’est leur résilience. Elles sont sur Terre depuis l’époque des dinosaures. Certaines espèces, comme la tortue serpentine, la plus imposante en Ontario, peuvent vivre plusieurs décennies. Leur capacité à prospérer dans des environnements précaires est pour moi une véritable source d’inspiration. En Ontario, les tortues hibernent sous l’eau pendant les mois d’hiver. En ralentissant leur rythme cardiaque et leur métabolisme, elles survivent sous la glace jusqu’au printemps en consommant peu d’oxygène.

Tortue peinte (Photo Chloe Robinson/CNC)

Tortue peinte (Photo Chloe Robinson/CNC)

Les tortues sont importantes au sein de leur écosystème, et c’est ce qui a motivé CNC à mener ces relevés. Elles contribuent au cycle des nutriments, maintiennent la qualité de l’eau, dispersent les graines des végétaux et jouent à la fois le rôle de prédateurs et de proies. Aussi, les tortues sont des espèces parapluies : en les protégeant, elles et leurs habitats, on protège du même coup des zones riches en biodiversité. En sachant précisément à quel endroit elles vivent, il devient plus facile de cibler où le travail de conservation doit être priorisé sur la péninsule.

Nid de tortue artificiel (Photo Chloe Robinson/CNC)

Nid de tortue artificiel (Photo Chloe Robinson/CNC)

 

En partant à la recherche de tortues sur la péninsule de Saugeen Bruce, quelque chose a attiré mon attention. Le long de la route, à proximité d’un milieu humide, j’ai vu des boîtes carrées en bois recouvertes d’un grillage métallique. Celles-ci servaient à protéger des nids de tortues et avaient été installées par des bénévoles locaux.

Ces dispositifs permettent de repousser les prédateurs et de protéger les œufs contre d’autres perturbations. J’en avais déjà vu, mais jamais autant au même endroit. Le long de la route, sur une distance de moins de 100 mètres, j’en ai compté plus d’une vingtaine. Il m’est apparu évident que des tortues nichaient ici, ce que j’ai trouvé inquiétant puisque les routes représentent un grand danger pour ces animaux.

En Ontario, sept des huit espèces de tortues indigènes présentes sont aujourd’hui menacées, les collisions routières étant l’une des principales menaces pesant contre elles. Les routes sont surtout dangereuses pour les femelles qui nichent. Dans le sud de la province, le trafic routier est très dense; impossible de parcourir plus de 1,5 km en moyenne sans tomber sur une route (mis à part dans certaines aires protégées).

Les femelles prennent le risque de traverser les routes pour trouver des sites de nidification, car le gravier chaud et meuble des routes non goudronnées et des accotements est idéal pour elles, ce qui les met, elles et leurs œufs, davantage en danger. Ces sites sont alors de véritables pièges pour les tortues qui s’y développent. Ces nids peuvent être écrasés par les voitures, altérés par la pollution et, comme de nombreux animaux se déplacent aux abords des routes, ils sont aussi exposés à un risque plus élevé de prédation. En quittant le nid à l’automne ou au printemps, les petits auraient à se frayer un chemin à travers la circulation.

Créer des sites de nidification plus sécuritaires

J’ai commencé à me demander ce que nous pouvions faire pour empêcher les tortues de nicher le long des routes. La réponse était simple : il fallait leur offrir une meilleure option.

Tortue serpentine (Photo Chloe Robinson/CNC)

Tortue serpentine (Photo Chloe Robinson/CNC)

Des sites de nidification artificiels peuvent être construits à l’écart des routes pour offrir aux tortues un endroit sécuritaire pour pondre leurs œufs. Ces monticules de gravier et de sable sont spécialement conçus pour reproduire des habitats de nidification naturels. Contrairement aux nids en bordure de route, ces sites fournissent un avantage aux jeunes tortues. En effet, une équipe de recherche a constaté que les petits ont plus de chances d’éclore dans ces nids et d’être en aussi bonne santé que ceux nés dans des sites de nidification naturels. Les sites de nidification artificiels aident les populations de tortues de deux façons : en réduisant les risques de collisions routières chez les femelles nicheuses et en augmentant le taux de survie des petits.

Ce printemps, quand je me rendrai sur le terrain pour ma deuxième année en tant que stagiaire à CNC, j’aurai une nouvelle tâche à accomplir en rapport avec les tortues. En effet, avec l’aide de la Fondation TD des amis de l’environnement, mon équipe va commencer à aménager des sites de nidification. L’année prochaine, nous espérons que les tortues qui pondaient en bordure des routes troqueront l’asphalte contre les sites que nous aurons aménagés pour assurer leur sécurité.

Les tortues étaient là bien avant l’invention des voitures et la construction des routes. Voilà pourquoi, en protégeant leur habitat et en mettant en œuvre des solutions créatives comme l’aménagement de sites de nidification artificiels, nous pourrons faire en sorte que les tortues et les écosystèmes qui en dépendent continuent de prospérer.

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