Eau douce 101
Panorama, vu du ranch de la rivière Flathead, Colombie-Britannique (photo de CNC)
« Eau. Canada. Ces deux mots sont, dans notre culture canadienne, aussi inextricablement liés que les mots « sirop » et « érable » ou « Coupe » et « Stanley ». En dépit de notre grand respect envers ce fluide à l’origine de la vie, il est très évident que nous surexploitons cette ressource, au détriment de notre santé environnementale et économique collective… » ~ David Boyd (2004) dans la préface du rapport The Future in Every Drop.
Des écosystèmes en péril
Bien que 70 % de la surface de la Terre soit couverte d’eau, l’eau douce des lacs, rivières, milieux humides, glaciers et nappes phréatiques ne représente que 3 % de ce total. Pourtant, 10 % de tous les animaux de la planète dépendent d’écosystèmes d’eau douce. En plus des poissons qu’ils abritent, ces écosystèmes fournissent des habitats aux tortues, grenouilles, escargots, mollusques, oiseaux, castors, otaries et à une multitude d’insectes. Malheureusement, les populations d’espèces dépendant de ces milieux ont chuté de 84 % en moyenne depuis 1970. Ce déclin est le plus rapide enregistré de tous les biomes (vastes unités écologiques) de la planète. Près du tiers de ces espèces risquent maintenant de disparaître.
De 1970 à 2000, la santé des écosystèmes d’eau douce de la planète s’est dégradée de 50 %. Plus de la moitié des grands cours d’eau du monde ont été gravement dégradés et pollués et plus de la moitié des milieux humides ont quant à eux disparu. Les causes de cette détérioration sont évidentes : la population humaine ne cesse de croître à l’échelle du globe et consomme l’eau douce pour un vaste éventail de services, notamment la production d’électricité, l’approvisionnement en eau potable, l’enlèvement des déchets, l’irrigation des cultures, l’aménagement paysager, le transport, la fabrication, la pêche, la lutte contre les inondations et les loisirs. Il en résulte la fragmentation, la perturbation, l’assèchement, la contamination et parfois même la destruction des écosystèmes d’eau douce. La présence d’espèces envahissantes est aussi un enjeu de taille. La conservation des écosystèmes d’eau douce est vitale non seulement pour protéger les habitats d’espèces en péril, mais aussi pour assurer le bien-être des populations humaines.
Classification des écosystèmes d’eau douce
Échantillon d'eau, Darkwoods, C.-B. (Photo de CNC)
Bien que les écosystèmes terrestres du Canada soient connus et qu’un système de classification bien établi leur soit consacré, on sait étonnamment peu de choses sur les écosystèmes aquatiques du pays. De même qu’une forêt côtière de pruches de l’Ouest diffère d’une forêt mixte d’épinettes, de bouleaux ou de saules, les rivières et les lacs diffèrent aussi les uns des autres par leur habitat physique, leur régime hydrologique (distribution et déplacement des eaux au fil du temps), la chimie et la température de leurs eaux, leur connectivité ou les interactions entre les organismes qui les habitent. La diversité des organismes d’eau douce à l’échelle du Canada témoigne de celle des écosystèmes de ses lacs et cours d’eau. Curieusement, il n’existe aucune classification reconnue pour les écosystèmes d’eau douce. Pour assurer une gestion adéquate des ressources d’eau douce, il est essentiel de définir les caractéristiques des écosystèmes en fonction de leurs processus environnementaux dominants, de leur habitat physique et de nos connaissances des espèces qui s’y trouvent.
Le saviez-vous?
- L’évaporation de l’eau à la surface des océans est la principale source d’eau douce, avec un volume d’environ 434 000 kilomètres cubes d’eau par année.
- Avec 7 % des réserves mondiales, le Canada possède la troisième plus grande réserve d’eau douce renouvelable au monde, après celles du Brésil et de la Russie. Ces réserves sont celles qui peuvent être réapprovisionnées par les précipitations (pluie, neige, etc.). Elles sont considérées comme non renouvelables lorsqu’elles ne peuvent pas être réapprovisionnées, par exemple lorsqu’elles se trouvent sous terre dans une région aride.
- Chaque année, les cours d’eau du Canada transportent 7 % des réserves d’eau renouvelables de la planète.
- L’eau douce couvre presque 9 % de la surface du Canada, soit 891 163 kilomètres carrés.
- Le bassin des Grands Lacs (partagé avec les États-Unis) abrite le réseau de lacs d’eau douce le plus étendu au monde.
- Environ 60 % de l’eau douce du Canada s’écoule vers le nord, alors que 85 % de sa population habite le sud du pays, près de la frontière avec les États-Unis.
- En termes de superficie et de longueur, le bassin hydrographique du fleuve Mackenzie (nord-ouest du pays) est le plus vaste au Canada.
- Les lacs, fleuves et rivières couvrent environ 12 % du territoire canadien.
- Plus de 8 500 cours d’eau au Canada sont nommés.
Que fait CNC pour protéger les écosystèmes d’eau douce?
Conservation de la nature Canada (CNC) a donné l’exemple en mettant sur pied un système de classification des écosystèmes pour les rivières et les lacs de la Colombie-Britannique (C.-B.) et de la portion ontarienne du bassin des Grands Lacs.
- Pour faire progresser la conservation des milieux humides en Colombie-Britannique, l’équipe de CNC y a embauché 5 technicien(ne)s spécialistes de ces milieux en 2021 dans le cadre d’une initiative provinciale menée par la BC Wildlife Federation intitulée « Wetlands Workforce » et destinée à entretenir et surveiller des milieux humides. Grâce au financement et au soutien de la Healthy Watersheds Initiative et du gouvernement de la Colombie-Britannique, les évaluations et inventaires réalisés par la « Wetlands Workforce » pourront favoriser une meilleure compréhension de la santé des milieux humides de la province. L’équipe de CNC en Colombie-Britannique s’est engagée à long terme envers la protection et la restauration d’habitats vitaux pour de nombreuses espèces en péril, dont la grenouille léopard.
- La « Wetlands Workforce » restaure des milieux humides aux aires de conservation de CNC dans l’ensemble de la Colombie-Britannique depuis 2021, tout en partageant ses connaissances et en collaborant avec l’équipe de CNC dans la province. Sur l’île de Vancouver, les milieux humides de l’aire de conservation Chase Woods de CNC sont en cours de revégétalisation, avec l’ajout d’espèces indigènes qui pourront supplanter la croissance d’herbes envahissantes au bord de l’eau. À l’aire de conservation Lac du Bois, dans la partie continentale de la C.-B., des activités de restauration comme le nettoyage des berges, l’élimination d’espèces envahissantes et l’installation de clôtures de protection ont toutes eues lieu pendant que la « Wetland Workforce » et CNC évaluent la santé des milieux humides.
- En Saskatchewan, l’aire naturelle Buffalo Pound de CNC consiste en 866 hectares de prairies indigènes et 7 kilomètres de berges sur la rive nord du lac Buffalo Pound. Ce lac, situé à 40 kilomètres de Moose Jaw, est d’une grande importance, puisqu’il stocke les réserves d’eau potable du quart de la population de la province, incluant celles de Regina et de Moose Jaw. Les prairies indigènes qui entourent le lac contribuent à filtrer l’eau qui s’y déverse, emmagasinent du carbone et retiennent les eaux de crue.
- Au Québec, CNC a contribué à fonder la Chaire de recherche sur l’eau et la conservation du territoire et est son principal partenaire d’activités de recherche. La chaire a pour mission de mieux comprendre comment les eaux souterraines irriguent les environnements naturels afin de faciliter la protection des écosystèmes.
- En 2017, CNC a lancé l’Initiative québécoise Corridors écologiques. Formée de 10 organisations issues de 11 régions du Québec, l’initiative propose une approche collective de l’aménagement du territoire et a notamment pour objectif d’améliorer la connectivité des milieux aquatiques.